Traduire Blood – Le champ lexical intime

Le 13 octobre 2020
Photo : Noelle Q. de Jesus
recadrée par Patricia Houéfa Grange

Ca y est, c’est le dernier virage avant la parution officielle de Passeport, premier recueil de nouvelles de Noelle Q. de Jesus que j’ai la grande joie d’avoir traduit !

Dès le deuxième épisode de cette série de notes que je vous propose depuis plus de trois ans afin de partager cette expérience de traduction avec vous, j’avais évoqué ce que j’appelle le « champ lexical intime » que j’avais ainsi défini : « ce sont ces mots que l’on croise régulièrement d’un texte l’autre, d’une œuvre l’autre, d’un même auteur, comme des compagnons de voyage, des objets familiers rassurants ou des icônes vénérées. Je ne suis pas certaine que les auteurs soient toujours conscients de ce champ lexical ». C’est donc de celui de Noelle que je viens vous parler aujourd’hui, tel que je l’ai découvert. Je vais cependant nuancer un peu. Le champ lexical intime que je vais exposer aujourd’hui est celui de Noelle Q. de Jesus dans Blood/Passeport.

En effet, entre temps, j’ai lu le deuxième recueil de nouvelles de Noelle, paru sous le titre Cursed l’année dernière. Quelques-uns des mots du champ lexical intime de Blood/Passeport se retrouvent, d’après mes premières impressions, – je n’ai pas encore fait une lecture aussi lente et attentive de Cursed que celle occasionnée par la traduction de Blood – dans le champ lexical intime de Cursed, mais pas tous.

Je ne fais pas durer le suspense plus longtemps, voici les mots dont j’ai pu observer la récurrence appuyée dans l’ensemble du recueil Blood/Passeport. Et, comme je l’indiquais déjà il y a trois ans, la présence répétitive de ces mots est, en elle-même, porteuse de sens :

– cold (froid) : 97 occurrences           
– all at once (tout à coup) : 16 occurrences   
– washing machine (machine à laver/lave-linge) : 11 occurrences  
– Laundromat (laverie) : 9 occurrences         
– nape of the neck (nuque) : 7 occurrences   
Il y a ensuite des mots et expressions qui apparaissent un peu moins souvent que ceux précédemment cités, mais qui reviennent régulièrement : brand new (tout nouveau/tout neuf/flambant neuf), flannel (flanelle), kiss full on the mouth (embrasser à pleine bouche), tank top (débardeur) ou encore gooseflesh (chair de poule).

Je ne ferai pas une analyse détaillée de ce champ lexical, pour ne pas trop en dire et vous laisser le plaisir de faire votre propre voyage dans ces différentes histoires, en elles-mêmes, mais aussi à travers le sens porté par l’ombre et le creux des mots.

Mais, juste pour rappel, la plupart de ces textes mettent en scène des femmes de la diaspora philippine en Occident. Elles rencontrent, avec plus ou moins de bonheur et de fascination, un monde totalement différent de celui dont elles sont originaires. Ce sont des nouvelles construites autour de moments de tension, qui font bouillonner le sang, riches en émotions, sensations et sensualité.

Voilà. Je n’en dirai pas plus. Rendez-vous le 20 octobre en librairie !

[L’image d’illustration de cette note est un clin d’oeil à l’idée évoquée au départ pour illustrer la couverture de Passeport. Je trouve que cette paille tressée est une belle métaphore du tissage de mots que constituent aussi bien la rédaction que la traduction d’un texte.]

Et pour (re)lire l’ensemble de cette belle aventure de la traduction de Blood, suivez ce lien !



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