A l’occasion du 450ème anniversaire de la naissance de William Shakespeare, le collectif La Falaise et Une Compagnie proposent de célébrer ensemble l’œuvre intemporelle du Barde. Une journée ludique et festive à déguster en anglais et en français le 29 avril au Théâtre du Pont Tournant à Bordeaux. Voici l’ensemble du programme de la manifestation.
Le collectif La Falaise m’a invitée à participer à cet évènement. J’interviendrai à la fin des starters/entrées, entre 19h et 20h. Je ferai une lecture bilingue anglais/français et sonore (accompagnée notamment de mon bâton de pluie) autour du personnage si romantique d’Ophélie dans Hamlet.
Je lirai, en anglais, un extrait de la pièce décrivant la noyade d’Ophélie, puis je dirai, en français, ce merveilleux poème d’Arthur Rimbaud :
Ophélie
I
Sur l’onde calme et noire où dorment les étoiles
La blanche Ophélia flotte comme un grand lys,
Flotte très lentement, couchée en ses longs voiles…
– On entend dans les bois lointains des hallalis.
Voici plus de mille ans que la triste Ophélie
Passe, fantôme blanc, sur le long fleuve noir
Voici plus de mille ans que sa douce folie
Murmure sa romance à la brise du soir
Le vent baise ses seins et déploie en corolle
Ses grands voiles bercés mollement par les eaux ;
Les saules frissonnants pleurent sur son épaule,
Sur son grand front rêveur s’inclinent les roseaux.
Les nénuphars froissés soupirent autour d’elle ;
Elle éveille parfois, dans un aune qui dort,
Quelque nid, d’où s’échappe un petit frisson d’aile :
– Un chant mystérieux tombe des astres d’or
II
O pâle Ophélia ! belle comme la neige !
Oui tu mourus, enfant, par un fleuve emporté !
C’est que les vents tombant des grands monts de Norwège
T’avaient parlé tout bas de l’âpre liberté ;
C’est qu’un souffle, tordant ta grande chevelure,
À ton esprit rêveur portait d’étranges bruits,
Que ton coeur écoutait le chant de la Nature
Dans les plaintes de l’arbre et les soupirs des nuits ;
C’est que la voix des mers folles, immense râle,
Brisait ton sein d’enfant, trop humain et trop doux ;
C’est qu’un matin d’avril, un beau cavalier pâle,
Un pauvre fou, s’assit muet à tes genoux !
Ciel ! Amour ! Liberté ! Quel rêve, ô pauvre Folle !
Tu te fondais à lui comme une neige au feu :
Tes grandes visions étranglaient ta parole
– Et l’Infini terrible effara ton oeil bleu !
III
– Et le Poète dit qu’aux rayons des étoiles
Tu viens chercher, la nuit, les fleurs que tu cueillis ;
Et qu’il a vu sur l’eau, couchée en ses longs voiles,
La blanche Ophélia flotter, comme un grand lys.
Arthur Rimbaud
Extrait du recueil Poésies
par mon amie Julie Brault
J’espère que vous viendrez nombreux participer à cette belle fête shakespearienne !
En attendant, voici deux liens intéressants concernant le personnage d’Ophélie et le poème de Rimbaud :
– Ophélie
– Ophélie de Rimbaud
Et voici quelques autres interprétations picturales contemporaines de la mort d’Ophélie que j’aime énormément :
Arnaud Demaegd
M. A.
Benjamin Lacombe
Agata Kawa
Elena Kalis
(Petite parenthèse : il y a quelques jours, je vous parlais d’une lecture que je prépare autour de Frida Kahlo, lecture où planera un peu l’ombre fantomatique de la Llorona. Selon la légende mexicaine, la Llorona devient folle suite à un chagrin d’amour et noie ses enfants pour se venger, puis elle se rend compte de la gravité de son acte et se noie de chagrin … N’entendez-vous pas là un écho par rapport au personnage d’Ophélie ? Il n’y a pas de hasard !)
A mardi prochain donc !