A l’occasion de ses 50 ans de jumelage avec Los Angeles, la ville de Bordeaux organise 4 expositions mettant en avant des artistes de la ville californienne et les liens existant avec la scène artistique bordelaise. J’ai visité 3 de ces 4 expositions, la 4ème ne débutant qu’à la fin du mois d’août. Et deux de ces expositions m’intéressaient particulièrement car elles présentent le travail d’artistes Mexicains Américains, ceux qu’on appelle les Chicanos.
En effet … Il y a 11 ans (en 2003), j’ai passé un mois et demi en Californie, dans le cadre d’une université d’été à Berkeley, près de San Francisco. Cela m’a donné l’occasion de faire de belles excursions en Californie, mais je n’ai pas pu aller à Los Angeles, ce qui reste un gros regret. Il y a 10 ans (en 2004), j’ai passé 6 mois au Mexique dans le cadre d’un stage de fin d’études et j’ai eu l’occasion d’y découvrir à maintes reprises les relations très particulières de détestation cordiale qu’entretiennent les Etats-Unis d’Amérique et ceux du Mexique.
Aller voir ces expos a été comme une espèce de pèlerinage empli de souvenirs. Et j’y ai aussi beaucoup appris. J’ai découvert des artistes pour lesquels j’ai eu de beaux coups de coeur.
Cette exposition d’art contemporain vise à « faire apparaître les liens qui unissent ces deux scènes aux influences communes (graffiti, street art, comics, underground, courants hip-hop, punk, rock, …) au croisement de l’art et de la pop culture. »
J’ai eu trois gros coups de coeur :
– Zoltron (LA) et son personnage anti-nucléaire Sue Nami qui nous accueille dès l’entrée de l’expo :
– Mike Stilkey (LA) et ses gigantesques sculptures de livres dont il peint la tranche :
– BMD Design (BDX) et son sublime style puisant dans le vintage et la calligraphie :
Exposition Faraway So Close BDX-LA
Espace Saint-Rémi
13 juin – 13 juillet 2014
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Je suis entrée dans le vif du sujet avec cette expo. C’est celle où j’ai passé le plus de temps et c’est celle que j’ai préféré. Tant au niveau des oeuvres présentées que des déclarations des artistes exposés.
Tout le long de l’expo, on suit l’histoire de l’immigration mexicaine aux Etats-Unis, les tentatives d’assimilation des aînés, les revendications et la lutte pour les droits civiques des générations suivantes, le métissage culturel de la génération actuelle.
Voici quelques-unes de mes photos :
Toutes les minorités culturelles unies en une même lutte
Photo : Mariposa – Tous droits réservés
Photo : Mariposa – Tous droits réservés
Vincent Valdez :
Les héritiers de Diego Riveira, David Alfaro Siqueiros et Jose Clemente Orozco perpétuent la tradition du muralisme :
On peut aussi faire parler les murs grâce à des affiches qui se multiplient au moyen du procédé de la sérigraphie, notamment utilisé par l’atelier Self Help Graphics :
Photo : Mariposa – Tous droits réservés
Shizu Saldamando :
« Il n’y a pas de moi authentique. Nous sommes tous des métis, nous faisons tous partie d’un monde qui change constamment. »
Shizu Saldamando est de père mexicain et de mère d’ascendance japonaise.
Et c’est un de mes deux gros coups de coeur de l’expo :
Photo : Mariposa – Tous droits réservés
Photo : Mariposa – Tous droits réservés
Photo : Mariposa – Tous droits réservés
Photo : Mariposa – Tous droits réservés
Photo : Mariposa – Tous droits réservés
John Valadez :
« J’ai peint ce qui pour moi était le plus évident : ce que nous étions. Je cherche avec ma peinture, à montrer la beauté de ce qui est laid ou ignoré. »
L’expo présente aussi bien des photographies que des tableaux de John Valadez. Les photos qu’il prend lui permettent de reproduire ses modèles sur des toiles géantes (hyperréalistes) ou des fresques murales. John Valadez a d’ailleurs été accueilli en résidence au Musée d’Aquitaine pendant 6 semaines et a réalisé l’oeuvre monumentale qui orne actuellement la façade du musée.
C’est mon deuxième gros coup de coeur de cette expo :
Photo : Mariposa – Tous droits réservés
Photo : Mariposa – Tous droits réservés
Photo : Mariposa – Tous droits réservés
Les artistes chicanos ont des icônes : la Malinche, la Llorona mais aussi Frida Kahlo :
Yolanda Gonzalez :
Photo : Mariposa – Tous droits réservés
Photo : Mariposa – Tous droits réservés
Et puisque c’est désormais de notoriété publique, je me permets de le dire ici :
C’est en effet le cabinet de traduction où je travaille qui a effectué les traductions pour cette exposition. Pour ma part, j’ai traduit, de l’anglais au français, deux ou trois cartels de tableaux, dont celui du Half-Ass Donkey qui m’a donné un peu de fil à retordre, d’autant plus qu’au moment où la traduction a été faite, je n’avais aucune idée de ce à quoi pouvait ressembler le tableau correspondant. C’est donc avec grand plaisir que je l’ai découvert pendant ma visite :
Photo : Mariposa – Tous droits réservés
Inutile de préciser que ce type de traduction fait partie des traductions que je préfère réaliser !
A noter la présence dans l’expo de l’adaptation en court-métrage du poème épique Yo soy Joaquin de Rodolfo « Corky » Gonzalez par le réalisateur Luis Valdez.
A noter aussi une très belle bande son de chants ayant accompagné le mouvement chicano, diffusée dans toutes les salles de l’exposition. Je n’ai pas pensé à en noter les références, mais je vais me renseigner et revenir vous en parler !
Chicano Dream
La collection Cheech Marin (1980-2010)
Musée d’Aquitaine
27 juin – 28 octobre 2014
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Enfin, la troisième exposition présente des photos et vidéos des performances provocatrices du collectif chicano ASCO. « Asco » signifie « dégoût » ou « nausée » en espagnol.
Collectif qui s’est constitué en réaction à la marginalisation des artistes chicanos et à l’absence de reconnaissance dont ils faisaient l’objet dans les années 1970 à 1980.
Détournant le cliché selon lequel les artistes chicanos ne réalisent que des fresques murales, leurs performances se font fresques vivantes, à l’image de leur Walking Mural.
Evidemment, tout l’intérêt de cette expo est d’aller voir les vidéos des performances du collectif. Il ne sert à rien que je vous mette ici des photos de photos de performance !
Par contre, voici quelques éléments de décor et costumes qu’ils utilisaient pour leur performance et qu’ils fabriquaient eux-mêmes en papier. Le papier est un matériau peu cher qui leur a permis de prouver tout le génie des artistes chicanos qui parvenaient à réaliser des oeuvres somptueuses avec très peu :
Je ne peux finalement pas m’empêcher de vous montrer deux photos emblématiques de ce collectif, qui m’ont particulièrement touchée :
Les membres du collectif se contorsionnent pour dessiner les lettres qui constituent leur nom
Dois-je commenter ?
Tout est dans la photo et le titre de l’oeuvre
ASCO – No movies
CAPC Bordeaux
26 juin – 21 septembre 2014