Soeurcières-Louves

Le 26 février 2021

Ôte-toi de ma Lune

Au mitan de la nuit
je me suis éveillée
la peau habillée
d’un frisson tidal
J’ai bu le nectar
de ton clair laiteux
et ma chair a tremblé
de chacune de ses fibres
Doigts qui pénètrent la terre
et rhizoment aux mille profondeurs
des vibrations telluriques
Yeux qui transpercent le ciel
et ricochent aux mille horizons
des ondes spirituelles
Réveillé en moi le centaure
dont la flèche trace le lien
entres corps, âme et esprit
Je suis l’arbre trait d’union
entre visible et invisible
entre vivants et disparus
Soluble frontière entre les mondes
Je suis le fléau juste à l’équilibre
entre féminin et masculin
Tu viens tracer sur mon ventre
le cercle cotidal de nos cycles
embrassant en ta transe
les quatre directions
les quatre éléments
les quatre saisons
les quatre phases
de lune pleine à lune noire
des ténèbres à la lumière
de la naissance à la mort
de l’absence aux renaissances
En ton jour nocturne
je bois l’élixir nacré
de tes énergies sélènes
et ton astre en mon sein
transcende à présent tous prémices d’éclipse
J’ouvre ma peau, ma chair et mon sexe
à l’accueil des rosées d’épanouissement
et mes fleurs dansent la constellation Liberté
Des profondeurs fertiles
de mes lunes rouges
je rugis un cri primaire
déployant les ailes de mon instinct premier
La peau tendue de mon corps
fait résonner tambour
cet appel vers mes louves de sang
et réunit le coven des gardiennes d’Ishtar
Lève-toi, Soeurcière !
Lève-toi et marche !
Lève-toi, Soeurcière !
Parées de nos fourrures
mutant au diapason de la vie
Armées de la clairvoyance
puisée en nos menstrues
Lève-toi, Soeurcière !
Lève-toi et marche !
Lève-toi, Soeurcière !
Nous avons déterré les cendres de nos brûlées
les avons insufflées en nos flux
Femmes lunaires, femmes sauvages
nous nous révélons en toute éclipse
Lève-toi, Soeurcière !
Lève-toi et marche !
Lève-toi, Soeurcière !

Patricia Houéfa Grange
Tous droits réservés

J’avais déjà partagé ce texte avec vous il y a six mois, en vous racontant sa naissance, pendant le premier confinement, un texte qui est né en me secouant, en me jetant sur mon stylo et ma feuille de papier, en me bouleversant…

Il prend désormais un nouveau chemin. Bien sûr, il fera toujours partie de mon projet au long cours sur le(s) corps de(s) femme(s), mais il sera aussi au cœur d’un petit projet intermédiaire, uniquement audio, très organique, sur lequel je suis en train de travailler.

Si je publie à nouveau ce texte ici, c’est non seulement parce que je m’apprête à partager enfin avec vous la mise en voix et son (tambour chamanique) de ce poème, mais parce qu’entre temps, j’ai découvert La Chica et sa Loba et que j’y ai entendu des résonances-transes.

Je vous invite donc à écouter son bel album (cliquer sur l’image pour y accéder) :

Et plus particulièrement le titre La Loba (La Louve) :



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